L’éclat du diamant

Avec ce livre, j’ai appris que « avocat » dans le jargon de la police et des bandits se disait « baveux » ! Hum… Quelle conclusion devrais-je en tirer ? 😛
En attendant, découvrez tout de suite mon avis sur ce polar pas du tout comme les autres (dans le cadre d’un Book Club Spécial sur Livraddict) !

Quatrième de couverture.

« Quel peut bien être le rapport entre l’assassinat du journaliste Frédéric Carloni en plein Pigalle, une bande vampires assoiffés, un groupe international de communication et Gorgonzola, un petit singe de la tribu des Hominini ? C’est sur cette question pour le moins étrange que s’ouvre l’incroyable enquête de ce polar à l’écriture cinématographique. Véritablement immergé au cœur du célèbre « 36, quai des Orfèvres » au sein de l’équipe du commissaire Delajoie, vous serez entraîné, meurtre après meurtre, dans une marche folle à travers les hauts plateaux de la publicité, de l’image et de la grande distribution. Une quête de vérité, semée de morts et de fantômes, où la violence des crimes se heurtera à la brutalité ordinaire du quotidien, où les évidences se transformeront rapidement en leurres. Vous voilà donc prévenu : on ne prénètre pas impunément dans la maison de la mort.

Mon avis.

Par quoi commencer ? Le bon ou le moins bon ? Ce que j’ai aimé ou ce que j’ai pas aimé ?
Difficile de vraiment chroniquer ce roman tellement je l’ai trouvé dense, ennuyeux par moments… mais très intéressant à la fois !

L’histoire en tant que telle est passionnante, une enquête policière où on se demande toujours quelle sera la prochaine étape, quelle sera le prochain indice qui mènera à la solution de ce dossier très compliqué, dans lequel sont morts plusieurs personnes qui a priori n’ont pas de lien entre elles… Je dis bien a priori

On est vraiment placé au centre du commissariat, au « 36, quai des Orfèvres » et on suit l’enquête de l’intérieur. J’ai aimé cette ambiance, un peu comme si « on se trouvait là en stage ou bien en plein reportage TV où on suivrait une équipe dans la résolution du meurtre. C’était vraiment très intéressant et j’ai vraiment accroché à cette approche « de l’intérieur ».

Cependant, bien que l’histoire soit très prenante et malgré notre envie de continuer notre lecture avec frénésie pour connaître le fin mot de l’histoire, force est de constater que l’approche « documentation » donnée au livre est parfois trop (bien trop ?) pesante. Certes, c’est très intéressant tout ce que nous apprend l’auteur sur le fonctionnement de l’audimat et des publicités sur une chaîne de TV mais personnellement, ces passages m’ont assommée tellement ils étaient denses, longs et ennuyeux. J’ai eu l’impression de retourner à la fac et de devoir préparer un examen, c’est peu dire !

Par contre, à d’autres moments, ça m’a moins gênée, quand on parlait de sujets qui se rapprochaient plus de mes intérêts ou de mon métier : la procédure pénale, le droit ou encore le concept d’égalité des citoyens devant la justice évoqué par Delajoie.

Il y en a donc pour tous les goûts dans les problématiques évoquées et même si par moments, c’est ennuyeux, il faut bien reconnaître que l’information donnée est pertinente et enrichissante.

Sans rien dévoiler, je dois quand même avouer que j’ai été super impressionnée et admirative sur le dénouement de l’histoire. Malgré mes piteuses tentatives de résolution du meurtre, j’étais très loin du compte. La fin m’a surpris et pas uniquement sur l’identité de l’instigateur de tous ces meurtres mais également sur le mobile. Une fin magistrale !

Côté personnages, on ne reprochera pas à l’auteur d’être resté en surface et de ne pas les avoir approfondi, oh que non ! Les personnages sont extrêmement bien détaillés (trop même ?), on connaît leur passé et on sait pourquoi ils sont là où ils sont aujourd’hui. J’ai beaucoup aimé l’humour et l’état d’esprit de l’équipe de Delajoie.
Ceci dit, il y a beaucoup de personnages qui apparaissent dans l’histoire comme ça, sans « préparation » du lecteur (parfois, un chapitre s’ouvre sur un nouveau personnage dont on n’a jamais entendu parler avant) et y reviennent quelques chapitres plus loin quand on les a déjà oubliés ! J’ai trouvé que c’était dommage car j’ai parfois eu l’impression de me perdre non seulement dans le flot d’informations que je recevais mais également face aux personnages qui m’étaient présentés.

En ce qui concerne l’écriture, John Marcus a une plume divine et audacieuse. C’est un pur plaisir que de le lire. Cependant, sa façon de traiter l’information donne l’impression au lecteur de devoir apprendre un syllabus d’université et on se lasse vite… tellement l’envie de passer à quelque chose de plus « léger » se fait sentir au fur et à mesure de la lecture.

Quelques passages qui m’ont plu (en rapport avec le droit bien sûr ^^) :

« Le droit avait été l’outil forgé par les hommes pour les hommes eux-même pour combattre leur nature destructrice et permettre d’améliorer l’expérience commune » (page 88).

« Le droit était la confiance que l’homme avait placée en l’homme. Et sa réponse à une interrogation obsédante : « Comment, malgré la multitude et la diversité des individus, leurs exigences variées, leurs désirs souvent opposés, comment pouvait-on les faire vivre ensemble, sous une même lune, de manière raisonnable et profitable ? Plus qu’un défi, une véritable gageure » (page 88)

« Le traitement impartial de la justice face à des citoyens égaux entre eux était un truc qui avait toujours bien fait marrer Delajoie. (…)
L’homme ne sera jamais égal à un autre : ni en essence, ni en substance, ni en attributs. Même pas sexuels. Alors, « égaux en droit », c’était un pur rêve, une fiction, pour une société dématérialisée. Or en l’espèce, le matériel de l’espèce justement, c’était l’argent. C’est lui qui vous octroyait les droits, notamment celui d’être plus ou moins bien entendu et défendu. C’était un peu comme avec les gastéropodes : plus vous mettiez du sel sur un escargot, plus sa chair se dégorgeait des impuretés ; plus vous donniez du blé à un avocat compétent, plus sa science se libérait facilement et sa bave combative se répandait. » (page 285)

Concernant cette dernière citation, je dois admettre que bien que d’accord avec la première partie, je ne le suis pas vraiment avec la seconde partie où il est dit que plus vous payez un avocat, plus il vous défend bien. Je ne pense pas que la qualité d’un avocat doive se mesurer à ses prétentions au niveau de ses honoraires. Je pense que ceux-ci sont calculés avant tout en fonction de la spécialisation de l’avocat en question. Si vous souhaitez vous offrir un ténor du barreau en matière pénale pour votre dossier, que cela ne tienne mais si votre cas est « grave », ce n’est pas l’avocat ou ses honoraires demesurés qui vous feront échapper à une sanction méritée.
Sur le plan de la défense d’un client, je pense que même un avocat dont le spécialité n’est pas le droit pénal donnera tout ce qu’il a de lui-même pour défendre son client, même si ce n’est pas sa matière de prédilection. De plus, quelques ténors (je ne dis pas tous) acceptent de travailler pro deo et donc de défendre des gens qui n’ont pas les moyens.
Enfin, c’est en tout cas, la vision que j’ai de mon métier… Peut-être suis-je moi-même en pleine illusion ?

Bref, vous l’aurez compris, tout n’est pas blanc, ni noir dans cette lecture. J’ai aimé le livre par certains aspects et moins pour d’autres. Une suite est prévue… Vu la fin du premier livre, j’ai bien envie de me laisser tenter mais revivre 400 nouvelles pages de documentation frénétique et ennuyeuse, ça me fait un peu peur !
Néanmoins, malgré mon sentiment mitigé, mettre une mauvaise note à ce livre serait injuste de ma part. Ce n’est pas parce que j’ai trouvé la documentation trop longue et parfois ennuyeuse qu’il ne faut pas reconnaître le talent de l’auteur.

Note finale : 7.8/10

  • Histoire : 8/10 (j’ai bien aimé la partie « polar – résolution de l’enquête », le dénouement m’a vraiment scotchée mais trop de détails, trop d’informations qui tuent le rythme de l’enquête.)
  • Personnages : 7.5/10 (Ils sont super bien détaillés et très appronfondis. L’auteur va même jusqu’à nous parler de leur passé pour comprendre ce qu’ils sont aujourd’hui. Mais malheureusement, je n’ai réussi à accrocher à aucun personnage, sauf Delajoie que j’ai trouvé très complexe. J’ai cependant trouvé une bonne alchimie et un humour certain ainsi de l’équipe de Delajoie.)
  • Écriture : 8/10 (John Marcus écrit vraiment bien, c’est indéniable. Les mots sont bien choisis mais malheureusement j’ai trouvé qu’il y avait trop de longs passages sans diaologues et un manque d’aération au niveau de la présentation des pages. C’était trop condensé et quand j’arrivais sur une page sans dialogues, avec rien que du bla bla, j’étais déjà découragée avant de la commencer).
Pour d’autres avis de livraddictiens : Bibliomania
Pour lire nos discussions dans le cadre du book Club : Livraddict

Je remercie L’Autre Éditions de la confiance témoignée à Livraddict pour ce book club spécial ! Une première initiative du genre qui, j’espère, se renouvellera dans les prochains mois !

N’hésitez pas à visiter le site du livre, vous y trouverez des petites histoires « bonus » : L’éclat du diamant.

L’éclat du Diamant de John Marcus
L’autre Éditions, 2009
465 pages

Commentaires

  1. Un excellent polar que sa forme expérimentale peut sans doute légèrement desservir tant elle apparait comme novatrice au lecteur. Pour ma part j'ai trouvé l'essai transformé. Si ce n'était un ou deux petits détails de la narration ainsi que la présence de publicité j'aurai sans doute crié a la merveille. 11 février 2010 11:25

  2. Un book club spécial très réussi et une lecture surprenante mais très intéressante ! A renouveler ;) 11 février 2010 12:32

  3. Magnifique le book club hier. Livraddict nous réserve toujours de nombreux plaisirs. Comme toi, ma lecture de ce roman est mitigée mais le côté polar est vraiment très réussi. Une merveille si on ne garde que cet aspect(non aujourd'hui, je n'ai pas envie de dire ce que je n'ai pas aimé!) 11 février 2010 12:59

  4. Jess,
    Votre billet résume sans doute bien l’indécision, la surprise, l’agacement et la multitude d’émotions contradictoires que provoque chez certains la lecture de ce premier roman. J’imagine bien Valérie, par exemple, pester contre certains passages et devenir violette de rage. Pour le dire d’une manière imagée : « il m’em…. cet auteur ! Mais…. ». En tant qu’éditeur, c’est ce « Mais… » qui m’intéresse plus que tout. Sont-elles si fréquentes ces lectures qui font bouillir le sang et les sentiments ? (exceptées celles des vrais vampires, bien sûr ?). Je sais qu’il faudra tenir compte à l’avenir de cette « documentation frénétique et ennuyeuse » - vous n’y allez pas avec le dos de la petite cuillère quand même, Jess et je ne partage pas ce point de vue vous le comprendrez -, sans pour autant intervenir dans le projet de l’auteur ou frustrer sa volonté de « transmission ». Comme tout premier roman, il y a un foisonnement, une sorte d’urgence à dire beaucoup (trop peut-être) de choses. Mais finalement, comme le perçoivent bien d’autres lecteurs, tout fait sens puisqu’il existe un lien et une logique de démonstration entre tous les sujets abordés. Compte tenu de la qualité de son écriture (pour moi indiscutable), John aurait pu choisir d’écrire « facile » (« raconter une histoire romanesque très émotionnelle », point à la ligne). Et je crois que la majorité des lecteurs sent bien que son potentiel est avéré. Mais voilà, cet auteur a fait le choix courageux de la difficulté et de l’expérimentation. Certes, tout n’est pas parfait dans ce premier opus et tout reste à trouver et à prouver même pour obtenir un équilibre littéraire de ce « transgenre » qu’il a décidé d’explorer. Il est d’ailleurs obsédé par ce travail, le plus difficile sans doute, il vous en parlera beaucoup mieux que moi lundi prochain. Mais je ne doute pas un seul instant que, grâce aux remarques des premiers lecteurs, il arrivera un jour à trouver cette magie de la fluidité qui transforme une expérience de lecture originale en pure émotion littéraire. C’est ce qui, je le crois profondément, est formidable finalement : assister directement à la naissance de l’œuvre d’un écrivain, assister à sa gestation, à son évolution et, peut-être un jour, contempler enfin sa métamorphose finale et son « grand œuvre ». Je n’aurai pas pris les risques financiers que le projet de John m’imposera encore de longues années si je n’avais pas été profondément convaincu de cela.
    Amitiés à toutes et tous 11 février 2010 13:30

  5. Ton avis résume assez bien le mien... La jubilation de l'enquête, et tu décris très bien la place du lecteur au choeur de tout ça, mais à la fois, un ennui face à certains chapitres. 11 février 2010 13:47

  6. J'aime beaucoup ta critique, Jess.
    Apparemment, un livre qui ne laisse personne indifférent, en tout cas ! 11 février 2010 15:36

  7. Super soirée que nous avons eu hier soir, superbes chroniques de part et d'autres, avis différents et bien fournis...
    Vraiment tout est réjouissant ! 11 février 2010 19:12

  8. Je ne lis ta critique que maintenant, je ne voulais pas me laisser trop influencer par ton avis avant d'écrire la mienne (quoi que, avec le book club, j'ai bien dû être un peu influencée :D). Dans tous les cas, je suis assez d'accord avec toi: en somme, nous avons apprécié les mêmes choses, et ce que tu dis n'avoir pas aimé, ce sont plutôt des choix littéraires auxquels on adhère ou pas en fonction de ses propres goûts. 13 février 2010 19:06

  9. Oui on s'est bien fait manipuler par rapport à l'enquête et quel plaisir!

    Je suis contente que tu as aussi envie de découvrir le deuxième livre :)

    Vivement lundi ... c'est dans pas longtemps maintenant ;) 14 février 2010 23:24

Laissez un commentaire

9 May 2024 00:07