Hate List

Titre VF : Hate List

Titre VO : Hate List

Auteur : Jennifer Brown (USA)
Traduction de Céline Alexandre

Publié aux Editions Albin Michel, collection Wiz
Date de publication : 01 février 2012

Genre : Jeunesse, Drame

Pages : 389

Prix : 15,20 €
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Note


Quatrième de couverture

« C’est moi qui ai eu l’idée de la liste. Je n’ai jamais voulu que quelqu’un meure. Est-ce qu’un jour on me pardonnera ? »

C’est ce que pense Valérie, effondrée après un drame inexplicable survenu au lycée. Son petit ami, Nick, a ouvert le feu dans la cafétéria, visant un à un tous les élèves de la liste. Cette fameuse liste qu’ils ont écrite pour s’amuser et où figurent ceux qui étaient odieux, lâches, méprisants dans l’établissement. Maintenant, ils sont blessés ou morts. Et Nick s’est suicidé, emportant son secret pour toujours. Mais Valérie elle, est toujours là, enfermée dans une bulle de questions sans réponses.  Jusqu’au matin, où elle se lève et quitte sa chambre pour retourner au lycée…

Mon avis 

 Voilà un livre que je voulais absolument lire en raison du sujet abordé. L’année passée, j’avais eu un coup de coeur absolu pour le roman de Lauren Oliver (« Le dernier jour de ma vie ») qui traite d’une problématique difficile : le harcèlement moral ou physique dans les écoles.  Hate List, c’est le même sujet abordé d’une manière radicalement différente. L’émotion sera-t-il aussi au rendez-vous avec ce livre ?

Valérie n’ose plus sortir de chez elle depuis des mois. En mai dernier, son petit ami, Nick, s’est suicidé dans son école après avoir tiré sur plusieurs élèves et professeurs. Ses victimes n’ont pas été choisies au hasard, Nick a tué les personnes que lui et Valérie avaient  noté sur leur « liste de la haine »,  à savoir un carnet où ils écrivaient afin d’extérioriser leur haine envers les gens qui leur menaient la vie dure à l’école. Pour Valérie, il ne s’agissait de rien de plus. Mais pour Nick…
Aujourd’hui, jour de rentrée scolaire, Valérie a décidé de reprendre le chemin du lycée de Garvin et d’affronter le regard accusateur de ses camarades de classe qui la croient en partie responsable de la folie meurtrière survenue dans leur lycée.
Valérie parviendra-t-elle à supporter le regard lourd des autres et ces derniers seront-ils prêts à de nouveau l’accepter parmi eux ?

* * * * *

Avant de commencer cette chronique, je me suis demandée si j’allais utiliser la forme assez « cadrée » que j’utilise d’habitude en parlant de chaque point (intrigue, personnages et style de l’écriture) distinctement.
Et puis je me suis dis que ce roman n’était pas comme les autres et qu’il allait être difficile de ranger mon ressenti dans des cases comme je le fais à chaque chronique. 

Le sujet abordé par Jennifer Brown est un sujet difficile, tabou même, on n’ose même pas imaginer qu’une telle tragédie puisse se passer dans l’une de nos écoles. Pourtant, aux USA, c’est plus fréquent (drame du lycée Columbine pour la plus connue), peut-être en raison d’un accès plus aisé aux armes (mais ça, c’est un autre débat). Tout cela semble irréaliste, complètement fantaisiste… mais pourtant…

Avec ce roman, on touche une problématique qui m’est chère pour avoir été moi-même « victime » de moqueries, de plaisanteries douteuses de la part de mes camarades de classe durant les 6 ans de mes humanités. La faute à « t’es trop grosse », « t’es trop moche » ou encore « t’es qu’une gamine qui porte Mickey et pas Levis d’abord », bref une personne peu fréquentable pour des jeunes en quête d’identité qui ne cherchent qu’à se copier l’un l’autre et critiquer tout ce qui n’est pas comme eux. 

On dira que les jeunes – tout comme les adultes d’ailleurs – sont méchants entre eux et ne se rendent même pas compte du mal qu’ils peuvent faire à autrui. Si en tant qu’adultes, nous avons encore du mal à composer avec la méchanceté gratuite  – surtout aujourd’hui où l’anonymat d’Internet procure encore plus à certains la satisfaction de cracher leur venin dès que possible -,  imaginez un peu l’impact de telles moqueries, de ce harcèlement sur un jeune adolescent qui construit l’adulte qu’il sera demain. Tout cela laisse des traces, croyez-moi. Il m’arrive encore aujourd’hui à repenser exactement au mot près aux paroles dures et blessantes lancées par quelques inconscients.

Dans Le dernier jour de ma vie, Lauren Oliver – à travers les yeux de Samantha, une jeune fille qui prend plaisir avec sa bande de rabaisser les autres – aborde le sujet en montrant jusqu’au la méchanceté des uns peut conduire ceux qui en sont victime (j’évite d’en dire plus pour ne pas spoiler). Dans Hate List, Jennifer Brown aborde le problème d’une autre manière, en montrant une autre dérive, une autre façon pour celui victime de ce harcèlement moral de se « venger » de la méchanceté, de l’ignorance des figures d’autorité (je parle des profs et des parents) à bouger pour que cela cesse.

Attention que je ne cautionne pas la manière dont Nick va décider de prendre les choses en main pour faire payer à ses bourreaux le prix de leur arrogance envers lui et Valérie. MAIS, à un moment donné, il faut que chacun puisse réfléchir : chaque ado qui a sa tête de turc et qui éprouve un vilain plaisir à la torturer chaque jour, chaque professeur qui sait que tel élève vit un martyre au quotidien et décide de fermer les yeux, les parents qui ne voient pas le problème… doit se demander :  si j’avais agi différemment, en serait-on arriver là ?

*****

La manière dont Valérie nous raconte l’histoire m’a vraiment touchée. La construction du roman est vraiment intéressante : On part de la rentrée de septembre et donc de la décision de Valérie de reprendre le chemin du lycée pour découvrir ce qui s’est passé avant/pendant/après la fusillade
Valérie nous raconte avec justesse la façon dont elle a vécu les choses quand elle a pris conscience que la personne qu’elle aimait le plus au monde l’avait trahie mais aussi quand elle a découvert qu’à cause de cette liste qu’elle avait rédigée comme un exutoire, elle est suspectée d’avoir joué un rôle avec Nick dans la fusillade.  Elle nous raconte également les difficultés auxquelles elle doit faire face le jour de la rentrée scolaire, de supporter les regards accusateurs de ses camarades de classe qui la considèrent toujours coupable, de voir ses amis d’avant la renier et aussi et heureusement (!) de voir que dans ce paysage hostile, quelques-uns sont capables de changer d’avis et de faire en sorte que ce qui s’est produit ne se reproduise jamais.

J’ai beaucoup aimé retracer avec Valérie la chronologie des évènements de manière un peu désordonnée certes mais qui a finalement apporté une forte crédibilité à l’histoire, une authenticité qu’elle n’aurait pas eu si tout avait été narré de manière linéaire.  C’était intelligent de la part de l’auteur de prendre le récit au jour de la rentrée scolaire pour revivre avec elle le drame avec ses souvenirs et surtout avancer avec elle dans cette phase de reconstruction, à son rythme.

On appréciera également de voir la différence entre le vécu de Valérie et les différentes coupures de presse qui ont suivi la fusillade, voir comment les médias arrivent – pour captiver l’audience sans doute – à trouver des bouc-émissaires et réécrire une histoire qui n’est pas la leur.

J’ai aimé la relation qui se noue entre Valérie et son psychologue car plus on avance dans l’histoire, plus on va comprendre que l’histoire de valérie ne s’arrête pas aux railleries dont elle est victime à l’école avec Nick, car Valérie doit également composer avec une situation familiale pas facile à gérer quand on est une adolescente. 

Au-delà de l’histoire de la fusillade, de la reconstruction de Valérie, c’est la relation familiale qui m’a aussichoquée. Entre une mère qui craint que sa fille ne recommence sa folie meurtrière à chaque seconde, refusant de lui faire confiance et un père avec lequel elle a une relation vide, presque sans amour et dont les paroles vous blessent comme des poignards enfoncés directement dans le coeur, on comprend que le psychologue devienne la seule figure d’autorité qui ait une influence positive sur Valérie, dans la mesure où il est le seul à l’écouter, la comprendre et l’aider à surmonter cette épreuve. J’ai aimé voir cette relation évoluer car au-delà du travail du psychologue à proprement parler, on sent qu’un réel attachement, une vraie relation de confiance entre eux deux.

Valérie reste un personnage fort marquant, attachant dans ce roman. le lecteur est très proche d’elle, intime même puisque c’est elle la narratrice, elle qui nous raconte son histoire… en fonction de ses souvenirs, de ce qu’elle vit au quotidien, une vraie bataille contre elle même pour affronter non seulement le regard des autres et aussi la déception dans les yeux de ses parents mais sa culpabilité personnelle pour le rôle minime et indirect qu’elle a joué en rédigeant cette liste.
Et finalement, c’est le portrait d’une jeune femme forte qui va se dégager petit à petit… qui en survivant à cette première journée qui lui paraissant insurmontable va montrer qu’on peut se relever de tout et agir pour un futur meilleur, en ayant l’humilité de reconnaître sa responsabilité et de dire pardon.

*****

En bref, je terminerai cette chronique en vous disant que j’ai eu la larme à l’oeil pendant les 3/4 de ma lecture, ce roman fait vraiment naître un sentiment de malaise, on a vraiment l’impression de vivre les choses à la place de Valérie tellement l’immersion dans son intimité, dans ses émotions, ses sentiments est forte.
La fin m’a également très touchée, je ne m’attendais pas du tout à cela… mais en même temps, ça semble un final logique au vu de tout ce qu’on apprend sur Valérie tout au long de la lecture.

Même si j’ai adoré ce roman, je n’ai cependant pas retrouvé la même identification qu’avec le roman de Lauren Oliver que j’avais qualifié d’avoir été « écrit pour moi » tellement il m’avait bouleversé. Il faut dire que bien que touchant un sujet qui m’est cher, on reste très éloigné de ce que j’ai vécu – de ce que d’autres peut-être parmi vous auront vécu – durant les années lycée. 

Dès lors, ce roman vous touche, vous bouleverse, vous fait réfléchir sur l’impact que ces discriminations, ces railleries peuvent avoir sur les adolescents. Mais pour ma part, je n’ai pas ressenti toute l’émotion qui aurait aussi fait de Hate List un gros coup de coeur. 

Un livre à lire indiscutablement, qui remue, dérange même mais qui retrace avec justesse et authenticité la reconstruction d’une jeune fille qui doit faire face à l’incompréhension des autres mais aussi à sa propre culpabilité personnelle.

Les points forts :

  • La construction du roman : on découvre Valérie le jour de la rentrée scolaire pour remonter après dans le passé pour comprendre ce qui s’est passé avant, pendant et après la fusillade. 
  • la relation entre Valérie et son psy que j’ai trouvé très touchante : on sent le lien de confiance qui existe entre eux et que le médecin est pour beaucoup dans sa reconstruction.
  • Un sujet difficile abordé avec brio par l’auteur et qui fait réfléchir… ne devrait-on pas être plus vigilent à ce qui se passe dans les cours des écoles aujourd’hui ?


Les points faibles :

  • (Ce n’est pas vraiment un point faible mais bon !) Certains personnages sont vraiment exécrables et il est difficile de leur trouver des justifications à leur comportement, des excuses. La manière dont le père de Valérie se conduisait avec elle m’a simplement révoltée.


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Commentaires

  1. Très belle chronique. Moi aussi le comportement des parents m'a choqué. Merci d'avoir mis le lien de mon blog. 9 mai 2012 07:13

  2. Ce livre m'avait frappée à Cultura et je l'avais rajouté à ma wish, j'espère qu'il en sortira bientôt ! En tout cas, ton avis est très juste et donne très envie de découvrir les horreurs citées ;) 9 mai 2012 08:25

  3. J'ai beaucoup aimé ce livre, et mon seul point négatif a été le même que toi, la réaction de certains individus (notamment les parents, mais aussi certains de ses "amis"). C'était assez poignant! 9 mai 2012 11:51

  4. Ouf ! On a l'impression d'être dans le roman rien qu'à la lecture de ton billet. Je note de suite dans la WL ! 9 mai 2012 19:08

  5. Très belle critique! merci de m'avoir fait découvrir ce livre, ça donne vraiment envie de l'acheter. =) 10 mai 2012 21:38

  6. J'étais parti sur une construction différente, un peu comme la tienne pour mon avis mais finalement j'ai fait comme d'habitude. Comme toi j'ai été choquée par la famille, surtout le père, bon à jeté vu ses propos. Un livre poignant c'est certains mais pour lequel il est difficile de se sentir complètement concerné. 5 juin 2012 15:08

  7. Hello, belle chronique pour un très beau roman. Le Jean Levis, absent de ma garde robe de jeune fille d'ouvriers me rappelle aussi de bien mauvais souvenirs à une époque où ce vêtement était le Must de la mode... en tous cas je note le roman que tu cites pour une prochaine lecture car Hate list fût vraiment un coup de coeur pour moi donc je devrais aussi apprécier Le dernier jour de ma vie de Lauren Oliver ;-) 23 septembre 2012 18:40

  8. La réaction du père de Val m'a également choquée : que ce soit dur à accepter qu'elle ait joué un rôle (sans le vouloir) c'est une chose, mais la renier ainsi sans écouter ce qu'elle a a dire, c'en est une autre... J'ai également beaucoup apprécié ce livre en tout cas ! 14 novembre 2013 12:38

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