Chroniques de prétoire : Histoires drôles et moins drôles

Titre VF : Chroniques de prétoire : Histoires drôles et moins drôles

Auteur : Michèle Bernard – Requin
Publié aux Éditions Les Carnets de l’info
Date de publication : 13 janvier 2011
Genre : Témoignages
Pages : 189 (hors lexique)
Source : Service presse avec Les Carnets de l’info. Je remercie chaudement Béatrice qui m’a proposé de lire ce livre avec d’autres de mes confrères avocats dont vous trouverez les impressions ci-dessous.
Nombre d’étoiles :

Quatrième de couverture.
Ces histoires authentiques, qui sont « amusantes et tristes comme la vie » racontent une drôle de justice. Les avocats, les procureurs, les juges s’y montrent dans leur majesté dérisoire, leurs invraisemblables maladresses, et leur comique involontaire. Mais l’essentiel est peut-être ailleurs.
Au delà de l’éclat de rire ou du sourire de connivence, ces anecdotes révèlent la réalité de situations parfois préoccupantes. Par moments, une indignation se cache sous la dérision apparente et la dimension pédagogique demeure à l’évidence la préoccupation essentielle de l’auteur qui tend, à travers ces petites tranches de vie, à montrer certains aspects de leur vraie justice à ses concitoyens.

Mon avis
Quand Les Carnets de l’info m’ont proposé cette lecture (commune avec d’autres de mes Confrères), j’ai de suite accepté : comment joindre l’utile à l’agréable !
Cependant, après la lecture de ces chroniques, mon impression est assez mitigée… Et pas sur le livre en lui-même mais sur un monde à part, auquel je fais partie en en étant cependant étrangère…
De suite, je vous livre mes impressions…
À travers ces petites chroniques, l’auteur, le Juge Michèle Bernard-Requin, nous raconte des anecdotes (parfois drôles, parfois dramatiques et d’autres agaçantes) sur le monde judiciaire et les différentes fonctions qu’elle y a exercé : avocat, avocat général au Parquet puis Présidente d’une chambre correctionnelle et ensuite à la Cour d’Assises. En changeant les lieux, en mélangeant les personnalités afin de l’anonymat reste garanti (le Sacro-saint secret professionnel), elle nous raconte son expérience mais nous livre également ses impressions sur une Justice qui ne fonctionne pas toujours comme elle le devrait, notamment si on considère l’important arriéré judiciaire actuel.
J’ai trouvé ces anecdotes très intéressantes et vraiment bien expliquées, même pour des personnes qui sont totalement étrangères au monde judiciaire. Les termes employés restent abordables et lorsqu’ils tendent vers une procédure particulière, l’auteur l’explique avec des mots simples.
Cependant, je n’ai pas réussi à me retrouver dans ce livre ni à trouver des ressemblances avec mon expérience d’avocat.
Tout d’abord, car je reste une jeune avocate avec seulement quelques années de Barreau (j’ai prêté serment en 2004 – d’ailleurs, ça m’a étonnée de voir que la « procédure » de prestation de serment est la même en Belgique qu’en France) et ensuite parce que les anecdotes sont concentrées sur la sphère pénale, une sphère qui m’est totalement hermétique et que je ne pratique pas, par choix.
Je ne suis pas faite pour être un redoutable ténor de la défense et rêver de plaider en Cour d’assises… En fait, avec mon stress et ma timidité, cela relèverait plus d’un cauchemar en fait.
Ceci dit, la sphère pénale est la plus propice pour ce genre de chroniques et d’anecdotes étant donné que c’est dans les murs des chambres correctionnelles et d’assises que les cas les plus intéressants sont évoqués, parfois dans l’humour, mais parfois dans des conditions dramatiques. Et il est difficile de rester insensible devant les drames qui s’y jouent.
Ces chroniques m’ont également donné à réfléchir sur la question des honoraires des avocats, notamment pour le pro-déo : j’ai eu l’impression, à la lecture des chroniques, que les avocat stagiaires (c’est-à-dire les tous jeunes avocats qui entrent au barreau et doivent effectuer un « stage » sous la tutelle d’un avocat plus âgé) n’étaient nullement rémunérés et que les cas leur étaient directement assignés par le bâtonnier. J’espère que cette situation n’est pas d’actualité aujourd’hui et qu’il est prévu en France, comme c’est le cas en Belgique, un système d’aide juridique gratuit (permettant donc aux gens peu fortunés de faire appel à la justice gratuitement) où les avocats sont rémunérés par l’État, selon un barème forfaitaire selon les prestations accomplies par l’avocat.
De plus, ces chroniques montrent aussi la tendance de certains Confrères de penser que la fin justifie les moyens et n’hésitent pas à faire tout et n’importe quoi, en marge des règles de déontologie ou du simple respect d’autrui, pour gagner leur cause et attirer à eux une clientèle (je pense notamment à la chronique « N’est-ce pas, Maître ? » ou « Sa dernière plaidoirie »). Car le Barreau est un monde de requins, et même si la plupart des avocats se conforment aux règles, il existe toujours une minorité pour se jouer de vous et profiter de votre gentillesse naïveté, surtout lorsque vous êtes jeune.
Bref, cette lecture m’a permis de m’ouvrir à une sphère du monde judiciaire mais qui ne m’a nullement donné envie d’y entrer. La sphère du droit dans laquelle je travaille actuellement, à savoir le droit civil et le droit social (en grande majorité vu que je travaille sur les dossiers de surendettement) me conviennent parfaitement, et ce surtout que la procédure est quasiment écrite et que je ne dois donc pas plaider beaucoup (vous vous souvenez de la partie où je vous disais être une grande timide ? ^^).
L’auteur nous régale de ces petites histoires qui aideront sans doute les citoyens à mieux appréhender la Justice et ses dysfonctionnements dont elle parle sans tabou. Personnellement, j’ai beaucoup aimé la partie relative au jury des Cours d’assise et apprendre comment se passaient les délibérés.
Une manière ludique d’appréhender à un univers à part, qu’on est susceptible ou pas de côtoyer à un moment ou l’autre de notre vie !
Ah, juste une chose, si certaines histoires nous font sourire, d’autres nous laissent sur notre faim… Je pense à celle du psychiatre qui voit l’une de ses patientes dans un jury d’assises (laquelle était en fait dans un hôpital psychiatrique et s’était enfui pour répondre à la convocation de juré !)… Depuis, je n’arrête pas d’y penser et je me demande si le psychiatre a choisi de dévoiler l’information à la Cour ou pas… car cela, l’auteur refuse de nous le dévoiler ! 😉
Les avis de mes Consoeurs :
Marie (Barreau de Dinant ) :
J’ai adoré lire toutes ces anecdotes pour une jeune stagiaire comme moi qui a encore bcp à apprendre. Je trouvais intéressant qu’on puisse justement voir les différents côtés du métier judiciaire (stagiaire, avocat, magistrat). Je suis restée un peu sur ma faim puisque le dernier chapitre était pour moi le moins réussi (celui avec les médias), je n’ai pas réussi à accrocher, mais au final, ces histoires m’ont soit remémoré des souvenirs (parce que parfois on entend des réflexions ou des histoires comme elle reprend dans son livre), mais aussi parfois indignées (comportement antidéontologique des avocats) puisque la justice doit être juste et que certains acteurs se permettent de bafouer cela….
En tout cas, grand merci de m’avoir fait découvrir ce livre. Mon compagnon qui n’est pas juriste, en lui racontant certaines histoires, va commencer la lecture de ce bouquin…
Caroline (Barreau de Liège) :

L’auteur a été, durant sa carrière, successivement Avocat, Substitut du Procureur, Avocat général, Président de chambre correctionnelle et enfin Président de Cour d’Assises.
Cette expérience professionnelle riche lui a permis dès lors de raconter des petites histoires authentiques, même si parfois ces dernières sont arrangées pour que les protagonistes ne se reconnaissent pas, mettant en scène les trois acteurs principaux du monde judiciaire : les avocats, les membres du parquet et les magistrats.
Le lecteur a ainsi une vue complète du monde judiciaire et il lui est rappelé par la même occasion que la Justice, faite par des femmes et des hommes, a finalement, comme tout être humain, ses qualités et ses défauts.
Le style de l’auteur est simple et agréable. Elle ne s’attarde pas trop sur les techniques juridiques afin de ne pas, je suppose, effrayer le lecteur par un jargon trop légal.
Le livre nous entraîne assez vite dans l’univers judiciaire et la lecture de l’ouvrage est facilitée par sa division en chapitres indépendants qui peuvent être lus à différents moments.
Certaines histroires sont drôles, d’autres tragiques.
Les habitués du monde judiciaire se retrouveront peut-être dans certaines.
L’ouvrage se veut essentiellement pédagogique : familiariser le lecteur avec la Justice en partant de l’hypothèse que les probabilités d’y être confronté sont élévées et ainsi désacraliser cette institution.
Au delà de cette pédagogie, on sent poindre certaines critiques, voire parfois un certain cynisme, à l’encontre du système judiciaire, notamment lorque l’auteur parle des conditions de travail des magistrats.

En conclusion, un ouvrage à lire pour ceux désireux de mieux connaître l’univers judiciaire.
Carine (Barreau de Dinant) :
En général, j’ai bien aimé lire ce livre, c’était agréable à lire. Il ne contient pas trop de pages, ni trop peu, juste ce qu’il faut. Je trouve qu’il est rédigé dans un style simple, compréhensible pour tous, avec, en plus, un glossaire à la fin du livre pour les personnes qui ne sont pas du tout liées au juridique. J’ai trouvé ça intéressant.

Sur le fond, certaines histoires étaient amusantes et je me suis surprise à sourire quelques fois. Par contre, certaines m’ont déçues dans le sens où je suis restée sur ma faim (par exemple l’histoire du psychiatre et le juré). Les histoires sur les jurés m’ont particulièrement bien plues, peut être parce que je n’ai jamais fréquenté une Cour d’Assises et ca permet de s’imaginer un peu le déroulement d’un délibéré avec les jurés.

Globalement, j’ai apprécié de le lire (Je l’ai d’ailleurs conseillé à mon collaborateur). Pourtant, ce n’était pas gagné au départ. Je n’ai pas accroché au niveau de l’introduction. J’ai trouvé qu’elle présentait le monde juridique comme un monde idéal, où toutes les personnes y travaillant (avocat, procureur ou magistrat) s’épanouissaient et pouvaient y trouver son compte pour peu qu’elles trouvent la bonne voie (elle explique qu’elle passait à autre chose parce qu’elle se lassait quelques fois de la profession qu’elle exercait). Je n’ai pas trop aimé sa manière d’aborder le sujet parce qu’on fond, étant plongée dans le monde juridique, je savais que même si de l’extérieur, les gens peuvent nous percevoir comme chanceux, ce n’est pas toujours le cas et que c’est pas toujours rose.
Par contre, elle a su me faire aimer ce livre par ces petites histoires par lesquelles elles démontrent que le métier d’avocat, de procureur ou de magistrat n’est pas toujours simple et que sous le poids des responsabilités, du travail et de la pression, on peut être vite dépassé et en avoir ras le bol, bref, finalement, notre quotidien à tous…

Et d’un point de vue personnel, ce livre m’a un peu rassuré, je me dis que finalement, tout le monde n’est pas infaillible et que des avocats, qui sont devenus, selon elle, de grands tenors du barreau, ont commis également des erreurs étant plus jeunes. Ca m’a permis de dédramatiser un peu les miennes…
Amélie (Barreau de Dinant) :
L’auteur regroupe dans cet ouvrage des petites histoires parfois drôles, parfois tragiques et toujours empruntes d’humanité, se déroulant dans le monde judiciaire. Ce sont des anecdotes vécues par elle-même ou qui lui ont été contées.
L’introduction permet de retracer la carrière de l’auteur et de comprendre les raisons qui l’ont amenée à écrire ce recueil.
Elle a judicieusement divisé son ouvrage en diverses parties relatives chacune à un aspect des fonctions qu’elle a exercé au sein du monde judiciaire.
Cette manière de procéder rend l’ouvrage très clair et permet de mieux comprendre le contexte dans lequel les anecdotes contées se placent.
Les portraits souvent travestis pour éviter toute ressemblance avec des personnes existantes, sont toujours bien décrits et précis et rendent les acteurs de l’histoire plus humains.
C’est un ouvrage très agréable à lire. Certaines histoires sont tout à fait abracadabrantes. C’est divertissant. Mais au delà de ça, c’est également un ouvrage qui pose des questions et met en exergue les dysfonctionnements de la justice, à travers ses différents acteurs.
Pour ma part, eu égard à mon métier, je me suis retrouvée dans certains passages que j’ai particulièrement apprécié et j’ai également été surprise par des aspects auxquels je n’ai jamais été confrontés.
Le livre est accessible aux néophytes, grâce au glossaire qui explicite la portée de certains termes juridiques.

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24 April 2024 21:10